By Blondelle Tiofack │
Des émeutes anti refugiées, des incendies, des violences entre musulmans et hindou, sont quelques-unes des conséquences réelles de fausses informations dans le monde. Selon Media Defence, la désinformation est le fait de créer et diffuser une information intentionnellement fausse dans le but de tromper, nuire ou de manipuler. Comme principales causes de la désinformation, l’UNESCO a identifié l’effondrement des modèles commerciaux traditionnels qui entraînent entre autres le journalisme de « piège à clics », la transformation numérique des salles de presse et des narrations qui amène les journalistes à préparer des contenus pour de multiples plateformes, ce qui limite leur capacité à interroger correctement les faits, et la création de nouveaux écosystèmes ou « chambres d’écho » au sein desquelles des contenus inexacts, faux, malveillants et propagandistes peuvent se répandre. En Afrique, la désinformation a engendré comme conséquence, entre autres, un déluge de répression numérique dû à la limitation de l’utilisation de l’internet et des réseaux de communication.

Dans l’optique de « lutter contre la propagation des infox en Afrique de l’ouest et centrale», le Forum International de Yaoundé sur la Désinformation (FIYAD) a eu lieu à Yaoundé du 13-14 Juin 2022 a l’Institut Français du Cameroun (IFC) sous le thème : « l’accès à l’information et la liberté d’expression à l’épreuve de la désinformation ». Organisé par l’Association pour le Développement Intégré et la Solidarité Interactive (ADISI-Cameroun), en partenariat avec Agence française de développement des médias (Canal France internationale – CFi), l’IFC et Médias & Démocratie, ce forum s’inscrit dans le cadre du projet médias et gouvernance Désinfox Afrique de CFi. Assimilant la désinformation a un « cancer », le Président Directeur Général de CFi, Thierry Vallat a souligné que l’importance d’un tel forum vient du fait que la désinformation a ce pouvoir de créer des émotions, des pensées et des intentions négatives chez les Hommes qui prolifèrent, perdurent dans la société et dans le temps au point de les détruire. Eradiquer ce « cancer » qu’est la désinformation, reviendrait à «Construire une synergie nationale et internationale autour de la lutte contre la prolifération des fausses nouvelles au Cameroun ».
Autrement dit, « Comment créer un écosystème sain de médias professionnels et indépendants permettant aux journalistes d’exercer leur métier en toute déontologie avec l’appui des régulateurs et des pouvoirs publics ? » tel que l’a clairement posé CHRISTOPHE GUILHOU l’ambassadeur de France au Cameroun pendant la table ronde inaugurale.

La difficulté à combattre la désinformation serait due à un manque de clarté dans les lois ou les dispositions légales qui visent à réprimer les fausses informations d’une manière générale, l’absence ou l’insuffisance du dispositif légal encadrant l’accès à l’information d’une part et les médias en ligne d’autre part, dans les pays concernés, tel que l’a rappelé Simone Toussi, représentante de CIPESA, à la 1ère table ronde s’articulant sur une double interrogation « faut-il une loi contre les fausses informations ? Quelle situation aujourd’hui, quelles perspectives institutionnelles ? ». Les panélistes incluant Isabelle Vackat du Haut Conseil de la Communication de la République Centrafricaine, Alain Denis Mbezele, représentant du Conseil National de la Communication et Louis Christian Owono représentant de l’Agence de Régulation des Télécommunications (ART) du Cameroun, se sont mis d’accord sur le fait qu’il y a un travail à faire au niveau de la régulation des contenus avec une synergie de toutes les parties prenantes, sans limiter la liberté d’expression ni violer le droit d’accès à l’information, afin de préserver les valeurs démocratiques.

De ce même forum ont pu naitre quelques pistes de solutions pour combattre la désinformation. L’une portant sur l’éducation aux médias par la société civile, pour une utilisation responsable des Technologies de l’Information et de la Communication (TIC). Tel qu’a suggéré le PDG d’Eduk-media Blaise Pascal Andzongo à la 3ème table ronde qui portait sur les contributions de la société civile dans la lutte contre la désinformation. Cette solution concerne principalement les jeunes du fait de leurs utilisations majoritaires des outils informatiques. L’autre solution concerne majoritairement les acteurs de la chaine informationnelle dont les médias, les journalistes, les producteurs de contenus et les plateformes de contenus. Il leur revient d’accentuer la vérification des faits avant toute publication, ou retracer les informations publiées par les abonnés afin de détecter et labéliser les fausses informations.
De façon précise, la désinformation se fait plus présente lors des épidémies, notamment à l’air de la Covid-19 où l’infodémie atteint ses seuils les plus critiques. C’est la raison pour laquelle des réflexions ont été faites sur « Les fausses nouvelles (infodémie) : manifestations, initiatives locales et perspectives » dans un panel modéré par Valdez Onanina, journaliste et formateur à Africa Check. La synergie d’idée dans ce panel formé par le Dr Hemes Nkwa médecin et blogueuse sur la santé et Médecin épidémiologiste (Ministère de la santé publique), Marie Varloteaux, experte technique pour l’Agence nationale de recherches sur le sida et les hépatites a fait ressortir des actions à mener pour lutter contre les fausses informations en sante publique. Notamment, de sensibiliser les populations afin que les idées et informations reçues par rapport à cette pandémie puissent être prises avec des pincettes dorénavant. Une telle lutte perpétuelle doit être menée à tous les niveaux et impliquer divers acteurs notamment les personnels soignants, les acteurs de la chaine informationnelle, et les pouvoirs publics/ gouvernement.
Une mise en application de ces solutions permettra d’atteindre l’objectif principal du forum tel qu’énoncé plus haut, non seulement sur tout le territoire camerounais en particulier, mais en Afrique en général.